Le Suaire de Turin suscite des siècles de débats

Thibault Delacroix

Le Suaire de Turin suscite des siècles de débats

MYRNA BROWN, HÔTE : Nous sommes aujourd’hui le jeudi 21 novembre.

Merci de vous tourner vers WORLD Radio pour vous aider à commencer votre journée.

Bonjour. Je m’appelle Myrna Brown.

MARY REICHARD, HÔTE : Et je m’appelle Mary Reichard.

A venir ensuite Le monde et tout ce qu’il contient: le mystère derrière une ancienne relique religieuse.

Pendant des centaines d’années, l’Église catholique a prétendu être en possession du tissu dans lequel Jésus-Christ a été enterré. De nombreux scientifiques ont tenté de prouver si le linceul était réel ou s’il s’agissait d’un canular astucieux.

Voici Emma Perley de WORLD.

EMMA PERLEY : Il y a 670 ans, un grand morceau de tissu jaunâtre était exposé pour la première fois dans une petite église française. C’est du lin tissé avec une légère image d’un homme dessus.

L’Église prétend que Jésus-Christ a été drapé dans ce linceul après sa crucifixion et que son image a été miraculeusement imprimée sur la surface après sa résurrection.

En 1543, le théologien Jean Calvin affirme que le linceul est faux en raison de coutumes funéraires juives largement connues et il tire des preuves de la Bible elle-même.

L’Évangile de Jean déclare que Jésus était enveloppé dans deux bandes de tissu distinctes : une pour son corps et une pour sa tête. Après que Jésus soit ressuscité des morts, Simon Pierre et Jean ont trouvé ces deux « vêtements funéraires » dans le tombeau. Et aucun des apôtres n’a mentionné quoi que ce soit de miraculeux à leur sujet.

Malgré cela, beaucoup de gens sont convaincus que le linceul est réel. Il a finalement été transféré dans une cathédrale de Turin, en Italie, et est devenu connu sous le nom de Linceul de Turin.

Et pendant des centaines d’années, ses origines restent un mystère.

Autrement dit, jusqu’en 1898.

DOCUMENTAIRE : Il lui fallait obtenir une image parfaite. L’Église, le roi, le monde l’attendait…

Le photographe Secondo Pia prend pour la première fois des photos du linceul. Alors qu’il développe les négatifs dans une pièce sombre, il remarque quelque chose d’étrange. Audio de Le mystère du Linceul sacré documentaire.

DOCUMENTAIRE : Ses mains tremblaient alors qu’il levait le verre dégoulinant. Sa plaque négative contenait une image positive au lieu de la vague impression qu’il avait vue sur la croix. Voici une image photographique complète d’un homme dont le corps était couvert de sang coagulé, dont le côté présentait une large blessure et dont les mains et les pieds portaient les marques d’un crucifié.

La photo fait la une des journaux italiens. Et les chercheurs se demandent s’ils peuvent utiliser la science moderne pour prouver que le linceul est réel. D’autres sont sceptiques, affirmant que Pia a truqué sa photo.

En 1963, une équipe de chercheurs commence à tester de manière approfondie le carénage. Ils se rendent compte qu’il n’y a ni peinture ni colorant artificiel dessus. Et le médecin légiste Robert Bucklin note que les blessures de l’homme correspondent aux blessures de Jésus décrites dans la Bible. Il découvre même que l’homme semble avoir à un moment donné porté quelque chose de lourd sur son épaule.

Bien qu’elle révèle des indices sur l’identité de l’homme caché sous le linceul, l’image elle-même a intrigué les scientifiques pendant des années, car elle se trouve à seulement 200 nanomètres de profondeur sous la surface. C’est 400 fois plus petit qu’une mèche de cheveux humains ! En 2015, le chercheur Paolo Di Lazzaro teste sa théorie sur la façon dont l’image est apparue.

DI LAZZARO : L’une des caractéristiques les plus frappantes de l’image est l’épaisseur de la coloration. Une coloration évidemment si fine qu’elle ne peut être obtenue par aucune méthode conventionnelle, peinture, dessin…

Di Lazzaro et une équipe de chercheurs soufflent un morceau de lin avec de la lumière ultraviolette. Ils théorisent que le rayonnement brûlera une couleur jaunâtre plus foncée dans le tissu.

DI LAZZARO : Nous avons commencé à irradier plusieurs vieilles toiles de lin. Et après de nombreuses tentatives infructueuses, nous avons finalement obtenu une coloration semblable à celle d’un linceul qui reproduit presque la même profondeur de coloration, comme à l’image du linceul de Turin.

Di Lazzaro conclut que l’image sur le linceul aurait pu être produite par un éclair de rayonnement ultraviolet.

Une étude controversée de 1988 date le linceul du 14ème siècle en utilisant la datation au radiocarbone. Beaucoup se sont demandé comment un canular aussi élaboré avait pu être réalisé à l’époque médiévale.

Mais des tests récents suggèrent que le carénage pourrait être beaucoup plus ancien que cela.

En 2022, le chercheur italien Liberato De Caro publie un rapport datant le linceul d’il y a deux mille ans, en utilisant une méthode appelée diffusion des rayons X au grand angle.

Les fibres de lin vieillissent de la même manière que les pages de livres anciens. Ils jaunissent avec le temps à mesure que la cellulose se décompose. De Caro analyse donc le tissu en mesurant le temps nécessaire à la décomposition de la cellulose. Les résultats produisent une date qui pourrait être plus précise que les méthodes au radiocarbone.

DE CARO : La technique du radiocarbone ne convient pas pour dater des échantillons de textiles.

Plus de 400 études scientifiques ont été menées sur le Suaire de Turin. Beaucoup pensent qu’il s’agit de l’un des derniers miracles du Christ, hors de portée de nos outils scientifiques modernes, tandis que d’autres soutiennent que le linceul est une conception médiévale intelligente.

Il n’existe toujours pas de consensus scientifique sur les origines du linceul et celui-ci reste l’un des mystères les plus persistants de notre monde.

DI LAZZARO: Il est probable que ce ne soit pas un faux, mais en même temps, il est presque impossible de démontrer avec certitude qu’il s’agit du tissu funéraire de Jésus-Christ. Nous devons accepter la limite de la science, la limite de notre esprit, de notre connaissance.

REICHARD : Un merci spécial à Chiara Lamberti, freelance de WORLD, pour ses traductions en italien.